Un peu d'histoire
Les terres de Commelles, sont achetées par Louis VI le Gros à Guillaume de Mello et donnés en 1136 à l'abbaye de Chaalis. En 1151, une grange y est construite par cette abbaye cistercienne : c'est une exploitation agricole tenue par des moines convers. De cette grange, il subsiste la base de bâtiments datant du XIIIe siècle ainsi qu'un ancien four à tuiles. Les étangs eux-mêmes sont probablement aménagés dans le lit de la rivière dans la première décennie du XIIIe siècle comme le prouvent deux chartes de l'abbaye de Chaalis évoquant un vivier à poissons5.
L'extrémité des étangs sur le territoire actuel de la commune de Coye appartenant toujours au roi de France, ont été donnés à l'abbaye de la Victoire, à proximité de Senlis, à sa fondation en 1223. Ils sont vendus peu de temps après en 1293 au seigneur Pierre de Chambly, seigneur de Viarmes5. Ne formant qu'un seul ensemble, l'étang est divisé en deux au début du XVe siècle, ce qui donne naissance à l'étang Chapron. Peu de temps après, un troisième étang est construit, c'est l'étang de la Loge de Viarmes, ou étang de la Loge. Sur un plan de 1480, on distingue quatre étangs : les étangs de Comelle, Chapron, de La Loge de Viarmes et de la Troublerie en aval. Ce dernier étang a depuis disparu ; ayant été asséché au XVIIe siècle, il n'apparaît plus sur le plan de 18636.
Propriété de l'abbaye de Royaumont depuis 1412, les étangs sont vendus en 1658 au nouveau seigneur de Coye, Toussaint Rose, secrétaire de Louis XIV. À sa mort en 1701, ils sont rachetés par le seigneur de Chantilly, Henri-Jules de Bourbon-Condé, fils du Grand Condé. Les étangs servent alors toujours de viviers mais aussi à alimenter le moulin de la Loge, situé au niveau de l'actuel château de la Reine Blanche7. Ce moulin sert de moulin à tan au XVe siècle puis de moulin à draps à partir du XVIe siècle. Un autre moulin était situé entre l'étang Chapron et l'étang Neuf. Ce dernier moulin est abandonné en 1765, et le moulin de la Loge en 18256.
Pendant la Révolution française, les étangs sont mis sous séquestre puis vendus. Rachetés par Louis VI Henri de Bourbon-Condé en 1819, les bois environnants et les étangs servent de cadre aux chasses princières. De nombreux bat-l'eau s'y déroulent et les étangs sont souvent représentés dans les peintures de vénerie de l'époque. Les étangs sont légués à l'Institut de France qui en devient propriétaire en 18978.
Le château de la Reine Blanche
Le « château de la Reine Blanche », situé à l'extrémité ouest des étangs de Commelles, est le bâtiment emblématique des étangs. Selon la légende, la reine Blanche de Castille y aurait résidé, mais rien ne prouve qu'elle y soit jamais venue. De sa vie, l'édifice n'existait pas encore. La proximité de plusieurs châteaux royaux (Asnières-sur-Oise, Senlis, Creil, etc.) et ses fréquents séjours à Asnières et Royaumont permettent toutefois de penser qu'elle connaissait cette partie de la forêt.
Propriétaire de cette partie des étangs à partir de 1293, Pierre de Chambly, seigneur de Viarmes fait construire un logis flanqué de quatre tourelles en encorbellement. Il porte dès lors le nom de la Loge de Viarmes. Pierre de Chambly a pour successeur Jean de Boulainvilliers, auquel le duc Louis Ier d'Orléans achète le domaine de la Loge de Viarmes en 1406, pour en faire aussitôt don aux Célestins de Paris, qui cependant le vendent dès 1412 à l'abbaye de Royaumont. Les premières mentions du moulin flanquant la loge remontent au XVe siècle, mais le gros œuvre de ses maçonneries paraît contemporain au logis. Quand en 1655 Toussaint Rose achète la seigneurie de Coye, il cherche à agrandir ses terres et c'est ainsi qu'il procède à un échange avec les religieux de Royaumont, faisant de lui le propriétaire du domaine de la Loge, en mauvais état avec un étang à moitié comblé.
Après la mort de Toussaint Rose, survenu le 6 janvier 1701 à l'âge de quatre-vingt-neuf ans, les héritiers vendent rapidement le domaine à la famille de Bourbon-Condé qui le garde jusqu'en 1788. La loge sert ensuite de logement au meunier. En cette année, Guillaume Mandrou de Villeneuve, qui avait racheté le château de Coye un an auparavant, rachète également la Loge de Viarmes et transforme le moulin en papeterie, comme il l'avait fait avec la manufacture de Coye. Quatre changements de propriétaire s'enchaînent entre 1795 et 1815, mais le destin du château de Coye et de la Loge de Viarmes restent liés. Cela change quand Alexandre Andryane, propriétaire du château de Coye (qui reste toujours dans sa famille jusqu'à ce jour), cède le domaine de la Loge à Louis VI Henri de Bourbon-Condé en 1825. Ce dernier charge aussitôt son architecte, Victor Dubois, de reconvertir la Loge en un rendez-vous de chasse.
Le bâtiment est un exemple très précoce pour la France de style néogothique. Cette précocité est sans doute due au séjour du prince en Angleterre. Les travaux durent jusqu'en 1828. Trois statues de chevaliers, ajoutées sur la façade, sont réalisées par les sculpteurs Boichard et Thierry, tout comme les consoles sous la forme d'animaux fantastiques, les gargouilles et les balustrades. À l’intérieur, le bâtiment est constitué de deux pièces : un salon au rez-de-chaussée et une salle à manger au premier étage, auxquelles s'ajoutent des dégagements dans les tourelles. Les pièces sont voûtées sur croisées d'ogives, et les murs agrémentés de stucs imitant des lambris et de tentures vertes. Le mobilier d'origine dans la salle à manger était aussi dans le même style avec chaises à haut dossier et tables de bois. Les environs du bâtiment servent pendant tout le XIXe siècle de point de départ ou d'arrivée des chasses des princes et des ducs. Le 11 mars 1882, une grande chasse est donnée en l'honneur d'Élisabeth d'Autriche, et le lunch est servi au château de la Reine Blanche. Contrairement à la majorité du domaine de Chantilly, le duc d'Aumale ne donne pas le château de la Reine Blanche à l'Institut de France, mais il devient à sa mort en 1897 la propriété du duc de Chartres. - Le décor intérieur du bâtiment subsiste, bien qu'en état médiocre. Loué pour un bail commercial par l'Institut de France, il ne se visite pas16,7. Le bâtiment est classé Monument historique depuis le 9 mai 198917.